Erin O'Toole refuse de critiquer la gestion de la pandémie de Jason Kenney en Alberta

SAINT-JEAN, N.-B. - Le chef des conservateurs Erin O'Toole a refusé jeudi de porter un jugement sur la gestion de la pandémie de son allié politique, le premier ministre de l'Alberta, Jason Kenney, même si ce dernier a reconnu ses erreurs alors que les hospitalisations dues à la COVID-19 rapprochent la province du point de rupture.

La veille, M. Kenney s'est excusé auprès des Albertains et a changé son fusil d'épaule en imposant un passeport vaccinal, malgré ses réticences initiales. Admettant avoir levé les restrictions sanitaires trop tôt, il a déclenché l'état d'urgence sanitaire dans toute la province, prévenant que les soins intensifs pourraient être débordés d'ici 10 jours.

L'ALBERTA ABIDQUE

• Trudeau se tourne vers la crise albertaine pour critiquer O'Toole
• Jour 33: l'Alberta au coeur de la campagne

Dans le passé, M. O'Toole a louangé le leadership et la gestion de la pandémie de COVID-19 faite par Jason Kenney, le chef du Parti conservateur uni de l'Alberta. Il a même affirmé qu'il faisait un meilleur travail que le premier ministre Justin Trudeau.

Mais jeudi matin, interrogé à de multiples reprises à ce sujet par les journalistes - une dizaine de fois - il s'est refusé à toute critique et à tout commentaire.

Dans un club de curling de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, il a plutôt répondu à répétition qu'il «allait travailler avec tous les premiers ministres de toutes les provinces» pour lutter contre la COVID-19, avant de faire dévier le sujet de la gestion de la pandémie dans la direction de Justin Trudeau, qu'il a abreuvé de reproches.

Selon lui, M. Trudeau ne s'est pas battu contre la COVID-19: il a plutôt choisi de déclencher une élection en pleine crise sanitaire. De plus, son inaction et sa lenteur à réagir à la menace «ont rendu le travail plus difficile pour les premiers ministres des provinces».

On va respecter les choix faits par les provinces pour protéger la santé de leurs citoyens et celle de leur économie, a-t-il martelé lorsque talonné par les journalistes.

En faisant son mea culpa mercredi soir, M. Kenney a aussi déclaré que de prendre la décision de ne pas se faire vacciner contre la COVID-19 n'est «pas qu'un choix personnel, car il a de réelles conséquences pour toute la société». Mardi, un sommet de 270 patients se trouvaient aux soins intensifs, le nombre le plus élevé jamais enregistré depuis le début de la pandémie, ont fait savoir les autorités sanitaires albertaines.

Plutôt que de commenter cette affirmation, M. O'Toole a préféré répéter ses lignes préétablies. Il a insisté sur le fait que le chef libéral a déclenché une élection «coûteuse» dans son intérêt personnel plutôt que de faire son travail de premier ministre et de protéger les Canadiens.

Le chef libéral Justin Trudeau ne s'est pas laissé faire. Il a tenté de récupérer l'inquiétante réalité de l'Alberta _ une situation à briser le coeur, dit-il _ à son avantage.

Cela devrait faire réfléchir les Canadiens avant de se rendre aux urnes, avance le chef.

«Comme le premier ministre Kenney l'a avoué hier soir, son approche était erronée. Et le leadership, ça compte pour quelque chose dans cette pandémie. Le fait que M. O'Toole continuait d'applaudir le style de leadership et l'approche de M. Kenney même il y a quelques jours souligne à quel point ce n'est pas le bon leader pour en finir avec la pandémie.»

Il en a profité pour rappeler que le chef O'Toole n'exige pas que ses candidats soient vaccinés.

Les choix faits lors d'une élection en temps de crise prédisent comment l'on va s'en sortir, a lancé Justin Trudeau. «Et maintenant, les gens ont un choix au niveau fédéral: serons-nous encore plus forts dans notre lutte contre cette pandémie, ou abdiquons-nous en faveur des anti-vaccins du Parti conservateur en allant de l'avant avec des demi-mesures»? a-t-il demandé.

Bloquer le variant Delta

Si les conservateurs avaient été au pouvoir, «ils n'auraient jamais laissé le variant Delta prendre le dessus au Canada», a affirmé le chef des conservateurs jeudi.

Interrogé à savoir ce qu'il aurait fait, le chef a rétorqué qu'il aurait interdit beaucoup plus tôt les vols en provenance de l'Inde, de la Chine et de l'Iran. La frontière est très importante pour gérer la pandémie et le gouvernement a été «trop lent», dit-il. «Et à cause de ça, on a vu une augmentation des cas de variant Delta.»

Le Canada a interdit les vols en provenance de l'Inde le 22 avril, en raison de la propagation de ce variant.

M. O'Toole affirme qu'il l'avait exigé un mois plus tôt.

Si le chef des conservateurs a bel et bien fait cette demande, cette requête ne semble pas avoir laissé de trace. Le Parti n'a d'ailleurs pas répondu à la demande de précision de La Presse Canadienne à ce sujet.

De plus, pareille requête semble peu probable puisque l'Organisation mondiale de la santé (OMS) n'a pas qualifié le variant Delta comme un «variant d'intérêt» avant le 4 avril et l'étiquette de «variant préoccupant» n'a été apposée que le 11 mai.

Convaincre les aînés

Jeudi, l'équipe du chef O'Toole a aussi déployé ses efforts pour convaincre les aînés à voter conservateur.

Le parti propose une série de mesures financières dont le but est de leur permettre de rester à la maison, tout en recevant de l'aide. La pandémie a durement touché les personnes âgées vivant dans des résidences comme les CHSLD et beaucoup craignent de devoir y vivre un jour.

M. O'Toole a ainsi réitéré sa proposition d'instaurer une nouvelle prestation pour les soins aux aînés qui versera 200 $ par mois, par ménage, à chaque Canadien qui vit avec un parent de plus de 70 ans et qui en prend soin. Il veut aussi que le crédit d'impôt pour frais médicaux puisse être réclamé pour les aînés vivant à la maison, et non uniquement pour ceux qui vivent en résidence.

En soirée, le chef a participé à un rassemblement de partisans à Truro, en Nouvelle-Écosse. Dans cette province, les conservateurs ne détiennent qu'un siège sur 11, le reste ayant été coloré de rouge lors de la dernière élection fédérale de 2019.